TEXTES G.R.A.V.
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Propositions sur le mouvement
Groupe de recherche d'art visuel. Paris, janvier 1961.
Au mois de juillet 1960, quelques peintres ayant eu une attitude artistique traditionnelle décidaient de créer à Paris un Groupe de recherche d'art visuel où seraient confrontées leurs recherches et unifiées leurs activités plastiques.
Le but était pour eux d'échapper aux courants actuels de l’art dont I 'aboutissement est le peintre unique, pour essayer, par un travail en équipe, de clarifier les différents aspects de I 'art visuel.
Nous aimerions retirer de notre vocabulaire le mot art en tout ce qu'il représente actuellement.
Nous préférons considérer le phénomène artistique en tant qu'expérience strictement visuelle située sur le plan d'une perception physiologique et non émotive. Nos expériences peuvent avoir encore une apparence traditionnelle- peinture, sculpture, reliefs- pourtant nous ne plaçons pas la réalité plastique dans la réalisation ou dans I 'émotion mais dans la relation constante existant entre I 'objet plastique et I'oeil humain. Le problème du mouvement a été envisagé sous différents aspects. Nous en dégagerons quelques éléments a titre d'exemple, mais nous ne ferons pas ici I 'historique de cette évolution.
Mouvement sur la surface :
a) représentation du mouvement (une grande partie de la peinture traditionnelle, cubisme, futurisme);
b) concept du mouvement dans I 'art formel (Mondrian, Delaunay, Max Bill, etc.);
c) mouvement a base de la physiologie de la vision - mouvement virtuel (optique) (Albers, Vasarely, etc.).
Reliefs statiques :
a) mouvement optique (Tomasello, etc.);
b) mouvement obtenu par le déplacement du spectateur (Vasarely, Soto, Agam).
Surface en mouvement :
Mise en animation d'une surface déterminant une nouvelle situation optique (disques Duchamp).
Surface - écran :
a) cinéma (films, grattage, pellicule, dessin animé);
b) projections lumineuses (Schoffer, etc.).
Reliefs en mouvement :
a) actionnés mécaniquement (Tinguely, etc.);
b) animation naturelle.
Construction spatiale en mouvement :
a) actionnée mécaniquement (Schoffer, etc.)
b) animation naturelle (Calder, etc.)
(Plusieurs de ces aspects sont développés par les membres du groupe. Les peintres que nous citons ici sont mentionnes pour clarifier notre classification, leur énumération n’est pas limitative et n'a pas d'autre sens.)
L'idée de mouvement présuppose I 'idée de temps. Avec le mouvement I 'objet plastique quitte le plan spatial pour un plan spatio-temporel.
La perception de ces phénomènes s'en trouve déplacée et nous pouvons établir la relation image - mouvement - temps.
Toutefois, le mouvement peut être envisagé sous deux aspects :
Agitation gratuite.
Développement tendant a organiser une nouvelle situation visuelle.
Dans le premier cas, I 'animation de I 'objet plastique a pour but I 'objet spectacle, ses résultats sont essentiellement d'ordre émotif.
Le rapport image - mouvement - temps peut être altéré en donnant a I 'image ou au mouvement une priorité démesurée.
L'objet spectacle animé a existé de tous temps.
Mais le fait de faire pivoter une sculpture quelconque n'implique que I 'incorporation du mouvement a une situation statique donnée.
Qu'entendons-nous donc par mouvement?
Les trois facteurs image - mouvement - temps doivent être intégrés en un tout dont les composantes ne sauraient être dissociées. Leur rapport sera constant et une nouvelle unité ayant son existence propre va apparaître dans le champ visuel.
Cependant, ce n’est pas en tant qu'objet plastique que cette unité nous concerne.
Seule I 'existence du rapport objet-œil nous intéresse.
Comment définir ce rapport?
Sur une surface ou relief fixe.
La forme, considérée jusqu'a présent comme valeur en soi, et utilisée avec ses caractéristiques particulières, devient un élément anonyme reparti sur la surface. La relation entre les éléments acquiert ainsi une homogénéité et un anonymat pouvant créer des structures instables seulement perçues dans le champ de la vision périphérique. Le rapport objet plastique spectateur n’est plus constant. Un mouvement virtuel s'établit. La situation de cette perception s'en trouve modifiée.
Le mouvement réel :
La mise en animation de I 'objet plastique modifiera les données précédentes en y incorporant le mouvement et le temps. Toutefois, nous ne I 'envisageons ni comme sollicitation émotive, ni comme démonstration évidente, mais en tant que nouvelle proposition visuelle.
Cette situation nouvelle placée en dehors de I 'objet sur un plan non émotif - entre celui-ci et I'oeil humain - constitue un nouveau matériau de base pour développer de nouvelles méthodes d'approximation en utilisant les possibilités combinatoires, la statistique, la probabilité, etc.
La conception même de cet objet peut être envisagée soit en tant que déroulement immuable d'une situation donnée, soit en tant que proposition dans les différents agencements engendrant une infinité de situations visuelles possibles.
Paris, janvier 1961.
G.R.A.V.,
Groupe de recherche d'art visuel.
Morellet, Le Parc, Sobrino, Yvaral, Stein.
Proposals on the Movement
G.R.A.V., Paris, January 1961.
In July 1960, several painters, all with traditional artistic points of view, decided to create a Visual Art Research Group, where they could compare their research and bring together their activities.
Their goal was to escape from current trends in the art world—which ended up by creating a unique painter— in order to attempt, via working in a group, to clarify various aspects of visual art.
We would like to remove the word art from our vocabulary, and all that it currently represents.
We prefer to consider the artistic phenomenon in terms of a strictly visual, non-emotional experience located in the plane of physiological perception.
Our experiments may retain a traditional appearance: painting, sculpture, reliefs. However, we do not situate plastic reality in the creation or in the emotion, but in the constant relationship that exists between the plastic object and the human eye.
We have examined the problem of movement from a number of angles. We will list several elements as examples, but we will not give the history of this evolution here.
Surface movement:
a) The representation of movement (a large part of traditional painting, Cubism, Futurism);
b) The concept of movement in formal art (Mondrian, Delaunay, Max Bill, etc.);
c) Movement whose basis is the physiology of vision— virtual movement (optical) (Albers, Vasarely, etc.).
Static reliefs:
a) Optical movement (Tomasello, etc.);
b) Movement obtained by the movement of the viewer (Vasarely, Soto, Agam).
Surface movement:
Animation of a surface that creates a new optical experience (Duchamp's rotoreliefs).
Surface-screen:
a) Cinema (films, scratch films, animation);
b) Light projections (Schoffer, etc.).
Reliefs in movement:
a) Mechanically driven (Tinguely, etc.);
b) Natural movement.
Spatial construction in movement:
a) Mechanically driven (Schoffer, etc.);
b) Natural movement (Calder, etc.). (Several of these aspects have been developed by the group members. The painters listed here are mentioned in order to illustrate our classification, and the list is not meant to be limiting in any way whatsoever.)
The idea of movement presupposes the idea of time.
When it moves, the plastic object leaves the spatial plane for a spatio-temporal plane.
The perception of these phenomena is displaced, and we can thus establish an image-movement-time relationship.
Nevertheless, movement can be seen from two different viewpoints:
Gratuitous agitation.
Development that creates a new visual situation.
In the case of the former, the goal of animating the object is the object-spectacle, and the results are essentially emotional in nature.
The image-movement-time relationship can be altered, creating an image in which movement is given excessive priority.
The animated object-spectacle has always existed. But the fact of making a given sculpture rotate only implies the incorporation of movement into a given static situation.
What do we mean by movement?
The three factors of image-movement-time must be incorporated in a whole, whose components cannot be dissociated. Their connection will be constant, and a new unity with its own existence will appear in the visual field.
Nevertheless, we are not concerned with this unit as a plastic object. Only the existence of the object-eye connection is of interest to us.
How is this connection defined?
On a surface or fixed relief:
The form, which up to now has been considered as a value in itself, and used with its specific characteristics, becomes an anonymous element distributed across the surface. The relation between the elements thus acquires a homogeneity and an anonymity that are able to give rise to unstable structures, which are only perceived in the field of peripheral vision. The plastic object-viewer connection is no longer constant. A virtual movement comes into being. The situation of this perception is thus modified.
Real movement:
Animating the plastic object will modify preceding data by incorporating movement and time. Nevertheless, we see this neither as an emotional appeal, nor as an obvious demonstration, but as a new visual proposal.
This new situation, which is outside of the object on a non-emotional plane-between the object and the human eye-constitutes a new basic material for developing new methods of approximation, by using the various combinatory possibilities, statistics, probability, et cetera. The very conception of the object can be envisaged either as the immutable unfolding of a given situation, or as a proposal in the various arrangements that give rise to an infinite number of possible visual situations.
Propositions sur le mouvement
G.R.A.V., Paris, January 1961.
Proposiciones sobre el movimiento
G.R.A.V., París, enero de 1961
En el mes de julio de 1960 algunos pintores, teniendo una actitud artística tradicional, deciden crear en París un Grupo de Investigación de Arte Visual donde serían confrontadas sus experiencias y sus búsquedas y unificadas sus actividades plásticas. El objetivo era para ellos de escapar a las corrientes actuales del arte, en las cuales la consecuencia es el pintor único, ensayando a través de un trabajo en equipo, de clarificar los diferentes aspectos del arte visual.
Quisiéramos retirar de nuestro vocabulario la palabra arte en todo lo que ella representa actualmente. Preferimos considerar el fenómeno artístico en tanto que experiencia estrictamente visual situada en el plano de una percepción fisiológica y no emotiva, Nuestras experiencias pueden tener todavía una apariencia tradicional -pintura, escultura, relieves-, sin embargo no ubicamos la realidad plástica en la realización o en la emoción sino en la relación constante existente entre el hecho plástico y el ojo humano. El problema del movimiento ha sido tratado de diferentes maneras. Separamos algunos elementos a título de ejemplo sin hacer aquí la historia de esta evolución.
Movimiento sobre la superficie:
a) Representación del movimiento (una gran parte de la pintura tradicional, cubismo, futurismo);
b) Concepto del movimiento en el arte formal (Mondrian, Delaunay, Max Bill, etc.);
c) Movimiento a base de fisiología de la visión - movimiento virtual (óptico) (Albers, Vasarely, etc.).
Relieves estáticos:
a) Movimiento óptico (Tomasello, etc.);
b) Movimiento obtenido por desplazamiento del espectador (Vasarely, Soto, Agam).
Superficie en movimiento:
a) Animación de una superficie provocando una nueva situación óptica (discos de Duchamp).
Superficie-pantalla:
a) Cine (film, incisión directa, dibujo animado, etc.);
b) Proyecciones luminosas (Schoffer, etc.).
Relieves en movimiento:
a) Accionados mecánicamente (Tinguely, etc.);
b) Animación natural.
Construcción espacial en movimiento:
a) Accionado mecánicamente (Schoffer, etc.);
b) Animación natural (Calder, etc.). (Muchos de estos aspectos son desarrollados por los miembros del grupo. Los artistas que citamos aquí son mencionados para clarificar nuestra clasificación, su numeración no es limitativa, ella no tiene otro sentido).
La idea de movimiento presupone la idea de tiempo. Con el movimiento el objeto plástico abandona el plano espacial por un plano espacio-temporal. La percepción de estos fenómenos cambia y así podemos establecer la relación; imagen-movimiento-tiempo. Sin embargo el movimiento puede ser tratado bajo dos aspectos:
Agitación gratuita.
Desarrollo tendiendo a organizar una nueva situación visual.
En el primer caso, la animación del objeto plástico da como resultado el objeto-espectáculo, y su contenido es esencialmente emocional.
La relación imagen-movimiento-tiempo puede ser alterada si se da a la imagen o al movimiento una prioridad desmesurada.
El objeto-espectáculo animado ha existido siempre. El hecho de hacer girar una escultura cualquiera implica solamente la incorporación del movimiento a una situación estática dada.
Qué entendemos nosotros entonces por movimiento
Los tres factores imagen-movimiento-tiempo deben ser integrados en un todo donde los componentes no podrían ser disociados. La relación será constante y una nueva unidad teniendo su existencia propia va aparecer en el campo visual.
Sin embargo no es en el propio objeto plástico que esa unidad nos conviene. Sólo la existencia de la relación objeto-ojo nos interesa.
Cómo definir esa relación
Sobre la superficie o relieve fijo:
La forma considerada hasta ahora como valor en sí y utilizada con sus características particulares, se convierte en un elemento anónimo repartido en la superficie. La relación entre los elementos adquiere así una homogeneidad y un anonimato pudiendo crear estructuras inestables solamente percibidas en el campo de la visión periférica. La relación objeto-plástico-espectador deja de ser constante. Un movimiento virtual se establece. La situación de esta percepción se encuentra modificada.
El movimiento real:
La puesta en animación del objeto plástico modificará los supuestos precedentes incorporando en ellos el movimiento y el tiempo. Sin embargo no lo consideramos ni como solicitación emotiva, ni como demostración evidente, sino como nueva proposición visual.
Esta situación nueva, puesta fuera del objeto, en un plano no emotivo, entre éste y el ojo humano, constituye un mero material de base para desarrollar nuevos métodos aproximativos utilizando las posibilidades combinatorias, la estadística, la probabilidad, etc. La concepción misma de ese objeto puede ser prevista ya sea en tanto que desarrollo inamovible de una situación dada, ya sea en tanto que proposición en la cual los diferentes que la componen engendran una infinidad de situaciones visuales posibles.
Propositions sur le mouvement
G.R.A.V., París, enero de 1961
ATELIER LE PARC - 2014